Groupe de Travail Hyperspectral - décembre 2022
ORGANISATION: Audrey Minghelli (Université de Toulon/LIS)
DATE : 16 décembre 2022
LIEU : en visioconférence
Un groupe de travail «d’imagerie hyperspectrale » s’est formé à la suite d'un atelier du CES Couleur de l’eau en 2022 pour permettre aux chercheurs intéressés par les données issues des capteurs hyperspectraux, de partager, comparer des méthodes d’inversion originales et de discuter des résultats obtenus. Avec de nouveaux capteurs en vol, combinés à des hautes résolutions spatiales, les données hyperspectrales ouvrent de nouvelles possibilités d'explorer les données satellitaires sur la couleur de l'eau.
Objectifs du groupe de travail :
- Fédérer la communauté hyperspectrale française pour des applications liées au milieu aquatique,
- Faire connaître les travaux de cette communauté,
- Proposer des méthodes de traitement pour les données hyperspectrales satellitaires,
- Lister les besoins de la communauté sur les spécifications que devrait avoir un futur capteur hyperspectral.
OBJECTIFS de la réunion du 16 déc. 2022:
- Présenter et faire connaître au sein de notre communauté les thématiques étudiées, les méthodes et les données utilisées (in situ et satellite),
- Présenter les capteurs hyperspectraux en vol (DESIS, PRISMA et EnMap) et futurs (PACE, AquaWatch et Galène),
- Réfléchir sur les moyens de faciliter l’utilisations des données hyperspectrales au sein de la communauté française.
Les présentations de cet atelier sont accessibles via des liens vers des documents pdf. Le compte-rendu intégral de cet atelier, est accessible depuis l'onglet "Compte-rendu" sur cette même page.
- Audrey Minghelli (Université de Toulon/LIS), Introduction sur l’utilisation de l’hyperspectral pour des applications en zones aquatiques. Audrey Minghelli a présenté la problématique des zones aquatiques, un éventail des applications, les capteurs multispectraux (leurs méthodes et leurs incertitudes), les capteurs hyperspectraux (leurs méthodes et leurs incertitudes), les capteurs hyperspectraux en vol et en projet. En conclusion, un intérêt croissant est observé pour l’hyperspectral avec de fortes attentes. Les points durs en hyperspectral couleur de l’eau sont la faible résolution spatiale et/ou faible SNR. Les performances d’estimation dépendent des capteurs, des corrections atmosphériques, des modèles et des algorithmes. Toutes les sources d’erreur sont donc à minimiser. Plusieurs capteurs satellitaires hyperspectraux sont (PRISMA, DESIS, ENMAP) ou seront (PACE) bientôt à notre disposition. Nous avons le soutien de nombreux organismes à la recherche. Les projets sont financés par l’ANR, le CNES, la DGA, l’INSU-PNTS…
- Touria Bajjouk (Ifremer) - Distribution et évaluation de l'état écologique des habitats benthiques en zone côtière. Comprendre le fonctionnement des communautés benthiques et modéliser les changements de leur diversité face aux pressions (anthropiques et naturelles) nécessitent de disposer d’information spatialisée pour le suivi de leur dynamique spatio-temporelle. A travers quelques exemples d’écosystèmes (Récifs coralliens, hermelles, végétation marine), Touria a montré comment l’imagerie hyperspectrale est utilisée pour caractériser la distribution des habitats benthiques côtiers et évaluer leur état de santé, notamment en appui à la gestion. Les approches de traitement concernent aussi bien du Machine Learning, l’inversion du modèle de transfert radiatif que du démélange spectral. Ce dernier s’avère particulièrement pertinent pour les sites côtiers à forte hétérogénéité spatiale. Elle a également souligné le développement en émergence de l’imagerie hyperspectrale sous-marine.
- Vona Méléder et Patrick Launeau (Nantes Université) - Utilisation de l'imagerie hyperspectrale de la méso- à la macro-échelle pour la quantification de la biodiversité, de la biomasse et de la production primaire des vasières littorales
Synthèse sur les travaux menés par Nantes Université (LPG et ISOMer) sur les vasières littorales et leurs perspectives. Depuis 2012 (thèse de F. Kazemipour), un modèle optique (le MPBOM) a été développé, et modifié en 2018 (Launeau et al. 2018) afin d’estimer, à partir de la réflectance mesurée (RA), le coefficient d’absorption alpha. Ce modèle repose sur le principe d’une double transmittance (T) au travers du biofilm micro-algal (i.e. le microphytobenthos) reposant sur le sédiment. Le biofilm a une réflectance propre estimée nulle, et absorbe les longueurs d’onde du domaine visible (dû à la présence de pigments chlorophylliens et caroténoïdes), alors qu’il est totalement transparent dans l'infrarouge. La pente du plateau infrarouge du spectre mesuré permet alors d’estimer la réflectance propre du support (RB), assimilée à une droite. Le coefficient d’absorption est directement proportionnel à la quantité de pigments, notamment de Chlorophylle-a qui est prise comme un proxy de la biomasse. Avec un jeu d’indices hyperspectraux (voir Launeau et al. 2018), il est possible de différencier les différentes classes d’algues selon leurs compositions pigmentaires. L’utilisation du MPBOM permet donc d’aboutir à des cartes de diversité algale et de biomasse (mg Chl a.m-2). Les perspectives sont d’ordre méthodologique et scientifique : 1) à quel point le changement d’échelle (i.e hétérogénéité sub-pixellaire et effet de l’atmosphère pour les radiations bleues notamment) impacte notre approche ? Les algorithmes développés en laboratoire ou in situ sont-ils applicables à de l’imagerie satellitaire sans biais ? 2) le coefficient d'absorption ayant une signification écophysiologique (voir Méléder et al. 2013 et 2018), peut-il être utilisé afin de développer des algorithmes d'estimation de la captation du CO2 atmosphérique et ainsi aboutir à des cartes de production primaire des vasières littorales et ainsi estimer leur contribution au cycle de Carbone côtier?
- Sophie Loyer (Shom) – Exploitation de l'imagerie optique au Shom et besoins hydrographiques pour l'utilisation de l'imagerie hyperspectrale.
Présentation des enjeux et besoins du service hydrographique français en matière de bathymétrie estimée à partir des données multispectrales et hyperspectrales. La mission principale du Shom porte sur la caractérisation de l’environnement physique marin depuis l’acquisition de mesures en mer jusqu’à la production et la diffusion de produits et services et il s’adresse à 3 secteurs en particulier : la sécurité de la navigation, le soutien aux politiques publiques de la mer et du littoral et le soutien à la défense. A ce titre, l’information qu’il diffuse se doit d’être qualifiée.
La bathymétrie est primordiale à un grand nombre d’applications ; les enjeux sur l’acquisition de cette information portent sur la surface des zones littorales à couvrir et sur le nombre croissant de demandes. La surface des zones littorales cartographiées avec les moyens de mesures conventionnels reste très restreinte par rapport à l’étendue des zones dont le Shom a la responsabilité et l’acquisition de données bathymétriques par très petits fonds (<20 m) représente un défi considérable du fait des nombreuses contraintes (dangerosité voire impossibilité de l’accès à ces zones pour diverses raisons politiques, météorologiques, …). L’estimation de bathymétrie à partir de données multispectrales et hyperspectrales permettront de compenser cette lacune et de fournir rapidement des données bathymétriques littorales. La solution développée est basée sur l'inversion d'un modèle de transfert radiatif reliant la réflectance mesurée par le capteur aux propriétés optiques des constituants de l'eau, du fond marin et des hauteurs d'eau. Elle relève de nombreux défis tels que la correction atmosphérique (pour le satellite), la paramétrisation du modèle de réflectance des fonds marins et la qualification des produits (fourniture des incertitudes associées aux produits créés). Un modèle innovant d'estimation des erreurs, basé sur un modèle d'inférence statistique, a été développé permettant ainsi d’attribuer un niveau de confiance aux résultats ; mais la quantification exacte des incertitudes verticales reste un défi. La capacité à relever ces défis dépendra de la qualité des mesures à disposition (e.g. la résolution spectrale, la résolution spatiale, la calibration des capteurs), et pour cela, les données hyperspectrales présentent un intérêt majeur.
- Jean-Michel Martinez (GET) – Apport de l'hyperspectral pour le suivi des flux sédimentaires en milieu fluvial par télédétection.
Synthèse des travaux sur le suivi des flux sédimentaires en milieu fluvial par télédétection satellite et radiométrie hyperspectrale in situ depuis 2007. Il existe en effet un grand déficit d’observation in situ sur les flux sédimentaires qui permettent à la fois de calculer les taux d’érosion des bassins versants mais aussi d’estimer les flux de matières exportés aux océans. Ces travaux ont notamment été menés en Amazonie et ont inclus des mesures radiométriques, granulométriques et minéralogiques sur les flux de matières minérales et la modélisation optique afin de mieux comprendre le lien entre concentration, distribution en taille et type des particules en suspension. Afin de poursuivre ces travaux, une station hyperspectrale permanente sera installée en 2023 sur un affluent de l’Amazone permettant un suivi à haute fréquence des flux sédimentaires mais aussi la calibration des données satellites. Ces travaux se déroulent également dans le cadre du CES “Couleur des eaux” du pôle THEIA sur les surfaces continentales qui documente également le suivi de la qualité des eaux en France avec l’OFB et l’INRAE.
- Audrey Minghelli (Université de Toulon/LIS) - Evaluation de la contribution d’un futur capteur satellitaire hyperspectral(BIODIVERSITY) pour la cartographie de la composition de l’eau, l’estimation de la bathymétrie et la composition des fonds en milieu littoral et lacustre
Présentation des résultats obtenus dans le cadre du projet HYPCOLAC (TOSCA CNES), à partir de simulation d’images BIODIVERSITY en zones côtières (Porquerolles) et en eaux intérieures (Camargue) pour estimer la composition de l’eau, la bathymétrie et la cartographie des fonds. L’étude sur le site de Porquerolles a montré que la cartographie des fonds est possible jusqu’à 10 m de profondeur avec HYSPEX. Les simulations BIODIVERSITY avec 53 bandes, 8 m de résolution et un bruit optimiste montrent que BIODIVERSITY permettra de mieux estimer les paramètres de la colonne d’eau (Chl, SPM, CDOM et profondeur) qu’avec ENMAP ou HICO. BIODIVERSITY avec bruit optimiste permettra une cartographie de fonds pour des pixels composés d'un seul type de matériau (e.g., sable ou posidonie), en particulier pour z < 10 m. En revanche, des difficultés sont observées pour estimer des pixels composés de mélanges de fonds (e.g., sable + posidonie). L’étude sur le site de la Camargue a montré que la bathymétrie ainsi que la cartographie des fonds étaient possibles avec le capteur BIODIVERSITY même en eau moyennement turbide. Les simulations BIODIVERSITY avec 53 bandes, 8 m de résolution et un bruit optimiste montrent que BIODIVERSITY permettra de mieux estimer la bathymétrie (RMSE = 0.28 m, RE(%)=14%) qu’avec DESIS (RMSE=0.38 m, RE(%)=17%). La comparaison avec des mesures de terrain a montré un bon accord R² = 0.77 (images subaquatiques) et R² = 0.8 (ou mesures in situ des habitats benthiques) comparé à DESIS (R² = 0.68).
- David Doxaran (LOV) - Mesures radiométriques hyperspectrales autonomes dans les estuaires et lagunes côtières pour la calibration/validation des produits satellitaires
Présentation d'un nouveau radiomètre hyperspectral opéré en autonome sur sites terrestres et aquatiques (fleuves, estuaires, lacs et lagunes côtières). Ce radiomètre est développé par l’Université de Tartu (Estonie) dans le cadre du projet H2020-HYPERNETS ; le système permettant d’opérer l’instrument en autonome (visée, réalisation de séquences de mesures, stockage et transfert de données vers serveurs pour contrôle qualité des données) est développé au LOV. Un réseau international est déjà en place, fournit des mesures radiométriques hyper-spectrales d’excellente qualité qui permettent d’évaluer les corrections atmosphériques appliquées aux mesures satellitaires de tous les capteurs en activité. En France deux sites sont déjà opérationnels : un au centre de l’Etang de Berre et un à l’embouchure de la Gironde.
- Malik Chami (Sorbonne Université) – GALENE : un projet de mission spatiale dédiée à la télédétection des eaux côtières et intérieures
Présentation des objectifs scientifiques et des spécifications requises d’une future mission spatiale (GALENE) hyperspectrale, panchromatique et polarimétrique dédiée à l’observation des écosystèmes aquatiques (eaux côtières et eaux intérieures). Le consortium de la mission GALENE implique 7 organismes français, 12 pays et 45 contributeurs internationaux. La mission, qui a été soumise à l’appel d’offre Earth Explorer 11 de l’ESA en 2020-2021, a été scientifiquement recommandée par l’ESA.
- Camille Desjardins (CNES)- Présentation des activités hyperspectrales au CNES.
Présentation d'une partie des activités hyperspectrales au CNES : les études internes et R&T en focalisant sur les récentes études sur le milieu côtier réalisées en partenariat avec Hytech-Imaging, les mesures de laboratoire de différents filtres hyper-spectraux (linéairement variable, assemblés, staircase, patternés, etc), le développement d’un prototype de photomètre hyper-spectral pour l’instrumentation du site de Lacrau (faisant partie réseau RadCalNet) pour la calibration radiométrique, le support à l’étalonnage en vol de PRISMA, les spécifications de la mission hyperspectrale actuellement en phase A au CNES, les travaux réalisées sur l’adéquation du SNR de cette mission aux autres erreurs radiométriques et enfin les travaux réalisés sur la stratégie d’échantillonnage dans le SWIR effectués par le groupe mission de cette mission.
- Discussions sur les moyens de faciliter l’utilisation de données hyperspectrales satellitaires. Plusieurs actions ont été proposées :
- Création d’un site web (type Padlet) accessible depuis le site ODATIS pour diffuser les informations suivantes :
- données hyperspectrales disponibles (PRISMA, DESIS, ENMAP) avec un lien sur les plateformes de téléchargement et de programmation d’acquisition,
- inventaire des méthodes de corrections atmosphériques et du « glint » dédiées aux observations hyperspectrales en précisant autant que possible les codes disponibles en open source
- inventaire des méthodes inverses d’estimation de produits géophysiques avec les références bibliographiques associées et les codes en open source quand ils sont disponibles
- librairies spectrales de réflectances du fond aquatique
- données in-situ (radiométrie, colonne d’eau, fond aquatique) de validation des observations satellitales sur des sites connus
- inventaire des instruments utilisés pour l’acquisition de mesures hyperspectrales avec les contacts associés ; information portant sur l’accord du responsable de chaque instrument quant à son prêt à d’autres équipes pour des campagnes de mesures terrain.
Compte-rendu de la réunion du 16 décembre 2022 du Groupe de Travail Hyperspectral, visualisable ci-dessous ou à télécharger ici.
Touria Bajjouk (Ifremer)
Xavier Briottet (ONERA)
Malik Chami (Sorbonne Université)
Christophe Delacourt (Université de Brest)
Camille Desjardins (CNES)
David Doxaran (LOV)
Patrick Launeau (Nantes Université)
Anne Lifermann (CNES)
Vincent Lonjou (CNES)
Sophie Loyer (Shom)
Vona Méléder (Nantes Université)
Jean-Michel Martinez (IRD/GET)
Martin Rapilly (Université de Saint-Domingue)
Léa Schamberger (Université de Toulon/LIS)
Charles Verpoorter (ULCO/LOG)
Louis Zaugg (CEA)